Mégafil : Le monde paysan (Ressources)
Cet article de 20min est pas le meilleur pour faire le tour de la question, d’ouvrir un débat serein avec son titre incendiaire.
Si vous avez d’autre liens qui permettent d’explorer cela, hésitez pas à partager dans les commentaires. Et je les mettrais dans ce post.
En tout cas, il dresse rapidement les contours de la problématique. Moi, j’ai l’impression que c’est devenu un pretexte pour ne pas rénumérer les caissiers et caissières tout comme les automates. Ce n’est pas non plus un boulot génial, c’est ingrat, chiant, robotique.
En revanche, que le supermarché coopératif soit non lucratif et co-géré ça me plait. Que ça puisse créer du lien, ça me plait aussi. Que ce soit rendu moins pénible parce qu’on fait des rotations de 3h/mois, c’est pas mal aussi.
Ça ferait moins de souffrance si tous ces boulots pouvaient etre partagés nottament : homme/femme de menage, éboueuse/éboueur, plongé…et je rêve de ça et cela permettrait une belle mixité sociale. :)
Revenons au supermarché, ces 3h ne seront jamais déclarés, ni reconnu. Et évidement que ça fait baisser les charges quand on ne cotise pas ta retraite. Magique ! Et pour ceux qui recherchent un petit boulot pour leur fin du mois, bon déjà qu’iels se font exploiter, et remplacé par des automates, qu’est ce qu’on leur propose ?
Est-ce que les supermarchés coopératif s’inscrive dans l’ubérisation ? Faut-il redéfinir ce qu’est le travail et sa valeur ? Faut il passer au revenu existence ? (Oui)
Bon bon bon bon
20 Minutes est un journal possédé par la famille Hutin, de joyeux drilles qui vont pas dire du bien de toute initiative sociale qui ne soit approuvée par le Saint Siège. Donc déjà, sachez qu’on part sur une base hostile.
Déjà, c’est un article de 2017, donc quand ils disent que les projets sont tous en phase de test et ont moins d’un an. Bon ben on en est plus là. Certains ont marché, d’autres non.
Si ces supermarchés coopératifs gênent les entreprises plus traditionnelles, c’est aussi parce qu’ils bénéficient de subventions.
Ah merde. Les politiques font des choix sur les modes de production? Mais où on va là!
Rappelons ce que ces gens entendent par compétition libre et non faussée: la nécessité d’avoir un gros capital de départ, une centrale d’achat capable de pousser les prix vers le bas et la capacité de vendre à perte pour écraser la compétition. Oui l’état aide des boites à démarrer. Et pour avoir testé ces eaux, je peux vous dire que les subventions pour démarrer une activité commerciale avec des concurrents ont des critères très exigeants.
La région Loire-Atlantique nous a subventionnés à hauteur de 10.000€
Wouhou! 10 000€! On va mettre à genoux le grand capital avec ça! Ça paye au moins le tiers de la mise aux normes d’une supérette dis donc!
J’aime bien comme ils ont essayé de trouver un responsable d’un magasin biocoop pour lui faire dire les trucs que Leclerc ou Carrefour aimeraient bien dire mais savent que ce serait un aveux.
Vous savez quel boulot ils craignent en fait que ce truc fasse disparaître? C’est pas caissière, c’est propriétaire de magasin. C’est actionnaire de la grande distribution. Les coopératives ont des prix bas, pas seulement parce que les tâches sont partagées, mais aussi parce que personne n’essaie “d’extraire de la valeur” pour les actionnaires. Il y a une immense différence entre une entreprise classique et une coopérative d’utilisateurs: dans le premier cas, on essaye de maximiser la marge, dans le deuxième, de la minimiser.
Et ça, dont l’article ne va pas parler, c’est un changement fondamental dans notre structure économique. Pas besoin d’employés ça veut aussi dire pas besoin de contre-maîtres. Pas besoin d’actionnaires ça veut dire pas besoin de pressuriser toute la chaîne pour extraire le maximum de jus de tous les maillons.
Ah voilà c’est tout l’interet de jlai.lu avec tous vos coms. Ça permet d’ouvrir d’autres perspectives. 😍
Après si je pensais aux caissiers et caissières c’est pcq j’ai connus beaucoup d’étudiant qui faisait ce boulot à la sortie des cours pour assurer la fin du mois et pouvoir à peu près bien manger.
Et donc, la non seulement tu changes de paradigme en supprimant les actionnaires mais aussi les caissier.e.s puisque le boulot a été collectivisé.
Après ya un autre truc dont l’article parle pas trop : le choix. Quand on va dans un supermarché, c’est souvent les meme marques alors que là, iels façonnent l’épicerie à leur image. C’est très différent.
Reste la question de la marge. Pour moi c’est important de dégager une certaine marge car ça permet d’absorber les travaux, par exemple de mise aux normes, d’hygiène ou de remplacer un chauffe-eau. C’est un amortisseur. Dans les grande distribution c’est devenu autre chose.
J’ai vraiment du mal à trouver désirable un système dans lequel les étudiants doivent travailler pour manger à leur faim. Comme tu dis c’est un changement de paradigme. Je peux tout à fait imaginer que dans un monde où tous les magasins marchent comme ça, les étudiants soient fournis à prix coûtant voire à perte si ce problème est évoqué. À mon école, quand on avait pas le sou, on allait à la cantine subventionnée et on mangeait pour 2 ou 3 euros. Et je me demande si ça demanderait beaucoup d’effort de la rendre totalement gratuite.
La marge, oui, il en faut une. Il faut une réserve, il faut un “profit” pour couvrir les coûts. Après c’est de la définition comptable. Et de la décision politique des utilisateurs: est ce que par exemple il y a un but idéologique d’essaimer le plus possible, et se faire une réserve pour ouvrir d’autres magasins? Est ce qu’il y a une volonté d’essaimer verticalement? (j’ai vu passer des article où ils décident d’investir dans des capacités de production aussi)
L’aspect important c’est que ces profits ne soient pas empochés par quelques actionnaires.
Si on veut parler de comptabilité, alors oui, il faut une marge commerciale, c’est-à-dire que le prix de vente des marchandises est supérieur au coût d’achat. Mais cette marge peut être utiliser pour payer les charges et financer les investissements sur le long terme sans pour autant qu’il y ait un bénéfice.
C’est le bénéfice, un résultat net positif qui est partagé entre actionnaire/propriétaire et réinjection dans l’entreprise. Si l’entreprise n’a pas de propriétaire à rémunérer, il doit être possible d’assurer l’autofinancement de l’entreprise tout en visant un résultat de 0.C’est pas grand chose mais ça change tout. À commencer par la recherche de la croissance. C’est vraiment intéressant…
Edit : orthographe. J’ai saigné des yeux à la relecture.
Exactement! Ça ressemble à un détail, mais ce détail fait que cette structure qui de l’extérieur va beaucoup ressembler à une entreprise classique n’a en fait pas les incitations habituelles et que l’on peut même arguer (selon certaines définitions) que c’est une structure non capitaliste (puisqu’elle ne fait plus “travailler” un capital pour son propriétaire)
J’ai jamais compris cette nécessité qu’on se fait d’avoir un résultat positif et en croissance. Dans de nombreuses cas, on pourrait s’en passer. Typiquement quand le ou les propriétaires y travaillent pour un salaire, ils pourraient le définir aussi mirobolant qu’ils le souhaitent et ensuite viser un résultat de zéro. Ça n’empêcherait pas l’entreprise de gagner plus ou moins d’argent selon l’année mais celui-ci serait dirigé en priorité vers le développement de l’entreprise. Et c’est une solution tout à fait désirable pour un propriétaire d’entreprise qui souhaite la conserver et la faire fructifier, voire la transmettre après ça mort.
mais celui-ci serait dirigé en priorité vers le développement de l’entreprise.
Qu’est ce que tu entends pas là si ce n’est sa croissance? (j’essaye juste de comprendre ton propos)
Ma réflexion est peut-être simplement mauvaise. Le développement, la croissance, oui c’est la même chose dans le fond. Mais si l’objectif principal, c’est de maintenir un indicateur autour de zéro et que par ailleurs on développe (ou on fait croire) l’entreprise, ce n’est pas pareil que quand l’objectif principal est de présenter un indicateur plus grand que l’année dernière.
Le résultat a 0 a une signification claire : L’entreprise a autant de produit que de charge. Un résultat plus haut que l’année dernière a une signification moins claire.
Ce que je comprends mal l’importance qui est donnée à l’amélioration des indicateurs alors que l’augmentation d’indicateur n’est pas une signification très claire en soit.
Oui totalement d’accord pour les étudiants. Je me rapelle très bien de mon père qui me parlait de ses boulots qu’il faisait quand il était jeune. Pour lui ça forgeait le caractère et tu apprennais le monde du travail.
Et pour lui c’était ça la maturité. Travail, salaire…perso je suis resté de marbre.
Pour les étudiants, je veux pas qu’iels travaillent. Les études d’abord, le reste après comme pour moi (AAH), j’avais l’AAH, c’est comme un revenu d’existence et tout le monde devrait l’avoir avoir le tout avecdes prix bloqué en immobilier et autre.
Bouffe gratuite car conventionnée et payé par les cotisation patronale ou solidaire (sécurité sociale alimentaire) et ça demandent pas tant d’effort que ça. C’est juste qu’iels ne veulent pas participer à la société en supprimant l’isf par exemple.
C’est un peu ce que j’avais en tete pour mon entreprise, en priorité investir dans tout ce qui me fera gagner du temps, comfort. Et une fois fait, prix coutant. Je pense que l’epicerie c’est pareil, ça demandera de gros investissement au début et après c’est stable.
Je participe au montage d’un supermarché cooperatif et ça me fait bondir de lire des commentaires comme ça.
- C’est Amazon qui met en danger le travail des caissières. Leur projet c’est le supermarché sans caisse et ce a une échelle mondiale, dans une volonté de s’accaparer le marché extrêmement juteux de la consommation alimentaire. Inutile de préciser qu’ils se contrefichent complètement de piétiner les salariés comme la planète. C’est dingue de pointer du doigt les supermarchés coopératif alors que le but est justement de construire une alternative viable au monopole des géants de la grande distribution.
- Les 3h par mois ne sont pas des heures de travail, la seule obligation est la présence mais si tu veux rester assis à lire un bouquin, c’est ton choix. Tu n’es pas un subordonné et personne n’a le droit de te donner d’ordre. Simplement le modèle repose entièrement sur la participation des sociétaires, on demande donc cet engagement pour avoir le droit de faire ses courses dans le magasin. Il y a des dispenses pour maladie, congés maternité, deuil ect… des aménagements pour souci de santé ou handicap, droit a la retraite.Tu peux prendre des congés autant que tu veux en demandant le “gel” de ton compte.
Donc non, les supermarchés coopératifs ne participent pas a l’uberisation de la société.
Je comprends que ça te fasse bondir.
Perso le statut bénévole, je suis pas pour. Vraiment pas. Cf mon post où qui permet de comprendre ce que je ressens (exploitation) et le contexte.
Comment tu définis ces 3h ? C’est du temps, non ? Ça fait tourner l’épicerie ? Parce que si ya personne, qui le fait ? Qu’iel ne fasse rien j’y crois pas vraiment, mais, en effet, si tu lui demande de faire quelque chose, il perd son statut de bénévole et c’est requalifié en salariat par la justice.
Personnellement, je les paierai ainsi que les cotisations sociales. Mais le bénévolat rend la chose impossible car ça doit etre un don désintéressé. Et sincèrement, je préfère qu’iels soient salariés ou en service civique car c’est un statut qui offre une protection et que cet argent l’aidera dans sa vie : loyer, bouffe, étude, cadeaux, retraite…
Si un stagiaire fait le marché 3h : je le paie.
J’ai un ami qui m’a raconté l’histoire d’un prof de lsf dans une asso. C’était chaotique, il bossait comme un malade, rentrait tard et ça créait des problèmes dans son couple, sa famille.
Un jour, l’asso a fermé. Il a cherché du boulot et il est devenu caissier. Là, il a eu :
- des vacances
- un salaire + retraite
- un emploi stable.
Ça vient d’une grosse entreprise.
Après, oui, c’est un changement de paradigme certe qui met fin à l’actionnariat mais l’économie actuelle et la politique ne suivent pas : ya pas d’aides, ya pas de revenu universel.
Et les charges augmentent, les conditions d’allocs durcissent, iels ont aussi besoin d’argent…Donc si zetes rikrak, ben zallez pas acheter grand chose.
Néanmoin, comme tu le dis, ça reste une révolution pour remettre l’humain au centre des décisions tout comme la monnaie libre.
C’est bien pour cela qu’il y a aussi des salariés, car pour tenir le tout il faut bien qu’il y ai aussi un groupe de personnes qui donnent (beaucoup) plus que trois heures. Je ne suis pas pour l’exploitation de soi par soi, je bosse dans le milieu du spectacle donc je connais bien le problème. Et je suis complètement d’accord avec toi pour le revenu universel ( un vrai, on est bien d’accord)
Yeah, et on doit composer avec. J’espère qu’un jour les projets du nuit debout verrons le jour.
Et, pour toi, qu’elle serait la ligne rouge qui différencie vraiment tout ça ? Quel seraient le point de vigilance à avoir ?
Ceci dit, vu que tu viens du monde du spectacle, c’est un choix judicieux et une belle transistion. 😁👍 Et tu pourra organiser tes propre spectacles, animations. À la coop, c’était le délire. :)
Ah ah, tu m’as mal comprise, je ne change pas de boulot ! J’adore mon travail dans la création et tant que j’arrive à en vivre je ne suis pas prête à laisser tomber. Je fais partie d’un collectif d’artistes, je bosse quasiment en auto prod et on monte des collectifs de compagnies pour gérer des cours dans les festivals promotionnels ( Aurillac, Châlons) Du coup quand on m’a branchée sur un projet de supermarché collectif, j’ai plongé bien évidemment. Donc voilà, c’est justement le financier qui tranche ce qui est prioritaire ou pas, le temps c’est de l’argent. Mais il y a aussi un autre point très important c’est savoir si le projet te donne de l’energie en retour ou au contraire ne fait que de te pomper.
Le projet de supermarché est vraiment vraiment passionnant et comme justement je n’ai pas de projet de salariat cela me permet de mettre le stop des que cela empiète de trop sur mes engagements pro, ma vie de famille ou mon moral car les désillusions sont nombreuses.
Reste a gérer sa frustration d’abandonner certaines choses où l’on a investi beaucoup, mais d’une manière générale si une bonne idée n’a ni écho ni relais au sein du collectif, c’est souvent que ce n’est juste pas le bon moment.
Yeah en tout cas bon courage :)
Allez, j’aime pas poster du reporterre d’habitude, mais comme on répond à 20 Minutes c’est de bonne guerre: https://reporterre.net/Dans-la-Drome-une-epicerie-sans-patron-revolutionne-le-commerce
Tu peux mettre le niveau supérieur, le post ne servait qu’à débattre et zigouiller 20min. 😁
L’article zappe la question principale: en cas de bénéfice (ce qui est visé), qui reçoit les dividendes ? Juste les fondateurs ? Tout le monde ? Sur la base du montant cotisé, ou sur la base du travail effectué ?
Vu de loin, ça ressemble à un concept déjà existant : l’apport en industrie. Plutot qu’apporter de l’argent au capital social d’une entreprise, une personne peut apporter son expertise et reçoit des actions/parts sociales en contrepartie.
Je participe actuellement au montage d’un supermarché cooperatif, et je peux te garantir qu’il n’y a aucune redistribution des dividendes. L’ensemble des bénéfices va a des baisses de marges, des investissements dans le magasin ou possiblement un don a une association . L 'AG rassemblant l’ensemble des coops ( une personne=une voix) le décide.
en cas de bénéfice (ce qui est visé), qui reçoit les dividendes ?
C’est la bonne question à poser dans tous les cas. La réponse montrera si on est dans une entreprise capitaliste ou une coopérative non-capitaliste.
Les deux que je connais (vaguement) sont organisés en assoces loi 1901: il est interdit de redistribuer les profits. Les profits vont donc dans la caisse et les membres décident de comment les dépenser: baisse des prix, nouvelle gamme, travaux dans la boutique, lancement d’un nouveau service, etc…
Deux autres modèles non capitalistes existent (à ma connaissance):
- la coopérative (de type SCOP) où tous les employés sont actionnaires à égalité (au moins au niveau des voix dans le vote des décisions et parfois également en part de dividendes)
- la mutuelle (qui est un très vieux statut encadré par la loi) où ce sont les usagers (les “sociétaires”) qui décident de l’allocation des ressources. Il peut y avoir des employés, mais ils n’ont pas voix au chapitre.
À noter qu’il ne suffit pas de se dire coopérative pour fonctionner comme je le décris. Par exemple, Super U est une coopérative officiellement, mais ses “membres” sont des SA individuelles (les supermarchés eux même). Idem je crois pour Leclerc.
Rah il faut vraiment que je fasse ce gros post sur les modes d’“entreprise” non-capitalistes que je traine dans ma todo list depuis plus d’un an…
L’article n’a pas mis les liens, mais la plupart des supermarchés associatifs se constituent en SCOP ou en SCIC qui ont un fonctionnement bien normalisé: s’il y a des bénéfices, il vont en majeure partie dans l’entreprise. Les dividendes sont divisés entre les actionnaires, qui sont … les employé.es, les fournisseurs, les usager.es, etc
Je doute que ce soit des scop, car une scop est réservée aux salariés. SCIC, plutôt.
Mais ça sent quand même le détournement de l’ESS. Fonctionner sur la base du bénévolat sans le récompenser, c’est un peu osé. Qu’une personne y bosse 1h/semaine ou 35h/semaine, ce sera la même pour elle au final. Les éventuels dividendes seront distribués sur la base du nombre d’actions detenues, pas du travail effectivement fourni.
La question n’est pas la récompense du travail bénévole, c’est son exploitation. Tu supposes une distribution de dividendes selon des parts d’action. C’est pas le cas dans les deux projets que je connais un peu. Les profits vont intégralement à la mission de l’assoce (dans mon cas c’est des assoces) et sont réinvestis, soit pour faire baisser les prix, soit pour payer des travaux.
Il y a un vrai débat à avoir sur le modèle du bénévolat, que des idéalistes comme moi aimeraient voir comme le futur du “travail” mais qui risque de fragiliser le modèle social qu’on a, qui lui part du principe que tout travail est exploiteur, hiérarchisé et tente de compenser cette brutalité.
J’aimerais bien que ces deux philosophies (compenser la brutalité du travail salarié et s’en affranchir) ne se considèrent pas comme ennemies mais arrivent à articuler des propositions qui ne se fragilisent pas mutuellement.
C’est pas du détournement de l’ESS, c’est que l’ESS est … l’ESS quoi. Si un Etat capitaliste te dit qu’il va créer une catégorie d’entreprises qui font du social, t’inquiètes que c’est pas avec ces outils qu’on fera la révolution. Il s’agit quand même de résoudre des problèmes *sociaux* et de *solidarité* par … l’économie. Ce qui est exactement la raison pour laquelle on a ces problèmes à la base.
Par contre pour le coup je suis pas pour la valorisation par quantité de travail, faire ça c’est rester dans la logique d’une valeur d’échange qui est délétère. Ce qu’on veut c’est que tout le monde ait suffisamment de quoi manger, même si Pierre a plus que Paul.
“Rémunérer” à la hauteur des investissements en temps, c’est encore et toujours favoriser les personnes qui ont du temps, de l’énergie, qui sont valides, qui savent faire, etc…
Franchement, c’est assez contre-productif d’être cynique de ces choses là. Dans l’ESS je vois surtout des gens qui veulent réellement résoudre des problèmes. Les capitalistes startupers se foutent de leur gueule, ils n’en sont pas à la cooptation.
Tu parles de révolution, c’est bien, mais le but de la révolution c’est une société différente. Une fois cassée celle qu’on a, y a un autre truc à reconstruire et l’ESS est un espace d’expérimentation pour ce genre de choses.
L’«économie» c’est la somme des interactions humaines. À moins qu’on vive tous dans des bulles autonomes dans l’espace sans aide de personne d’autre, on aura une économie. Elle sera peut être basée sur le don et le bénévolat, qui sont des choses qui existent dans notre économie, qui sont légales, et qu’on est libres d’expérimenter aujourd’hui. Les contraintes existent, oui. Les oppositions existent, oui. Mais je doute qu’on ait plus de libertés d’expérimenter au milieu d’une guerre civile que dans le cadre présent.
Je suis volontairement cynique pour (me) rappeler que l’ESS est un excellent moyen, mais pas une fin en soi, contrairement à ce qui transparaît bien souvent dans beaucoup de discours: “c’est de l’ESS, c’est propre”. Un peu comme le recyclage: pour les générations les plus anciennes, dire " je recycle" est suffisant pour se dédouaner de faire plus. Heureusement on a évolué et le recyclage est juste le minimum alors même qu’on en connait les limites.
Pardon si j’ai été négatif, tu as raison: utilisons les moyens que nous avons, tous autant qu’ils sont, pour défaire le capitalisme et créer notre société de rêve ! Une SCOP ou une SCIC doit devenir la norme pour les sociétés, à partir desquelles on pourra aller plus loin
Sur l’économie je ne suis pas tout à fait d’accord, c’est pas juste la somme des échanges sous la forme qu’ils ont, c’est aussi les règles que l’on se met pour gouverner ces échanges. À l’intérieur d’une famille aussi il y a toute une masse d’échanges, sans argent ou presque jusqu’à l’indépendance des enfants, mais on ne parle pas vraiment d’économie.
Oui l’économie ça regroupe aussi ces règles.
Et quand même si, on parle d’économie! L’héritage c’est une composante importante de l’économie! On parle également de capital social et culturel. On a tendance à ne voir que les échanges monétaires parce qu’ils sont plus faciles à mesurer de façon objective, mais l’économie c’est bien plus!
Ah oui, tu as raison. Moi je parlais surtout des échanges de service, d’entraide, de soutien, de dons, etc… Qui ne sont pas de l’économie
En effet, ça manque d’éléments et c’est plus axé sur le témoignage.
Peut-être un peu distant mais ça me fait penser au système de la Ruche Qui Dit Oui, c’est une startup de circuit alimentaire. Tu commandes ce que tu veux sur le site de ta ruche local (plus de choix dans les produits et les petites quantités par rapport à l’amap traditionnelle qui te balance 3 choux verts 2 kg de navet en hiver) et tu vas récupérer ta commande une fois par semaine au point de collecte. Le site met beaucoup en valeur le pourcentage d’argent qui revient au producteur par rapport au supermarché classique en ville.
Mais il y a des trucs qui me dérangent. Les ruches sont générées par des directeurs indépendants qui font le travaille de sélectionner les producteurs et d’organiser les points de collecte. Les points font appel à des clients bénévoles pour aider à la distribution. Donc une entreprise à but lucratif fait appel à des bénévoles pour ne pas avoir à assumer la logistique du point de collect.
Autre point noire, ils ont ensuite mis en place la possibilité de livraison directement à la maison sans passer par les points de collecte, mais en utilisant le travail de sélection des producteurs et de vente réalisé par les directeurs indépendants.Oui c’est proche :)
J’ai l’impression que la question des caisses automatiques est vue négativement dans cette histoire ? Ça ne résolverait pas le problème du bénévolat ?
Je le perçois négativement car ça fait de l’emploi en moins. Et d’un autre coté ça soulage le boulot des caissiers. Après, j’ai pas de données dessus pour me faire une vraie opinion.
Je sais qu’à terme tu pourra juste entrer et sortir du magasin sans avoir à sortir tes courses du caddie. Ça a déjà été expérimenté, à Lille je crois.
Une critique des supermarchés associatifs, épiceries solidaires etc par une épicerie autogérée: https://cooplib.fr/wp-content/uploads/2022/10/Cocoricoop-une-expe%CC%81rience-d-epicerie-autoge%CC%81re%CC%81e.pdf
(Désolé c’est un pdf)
En substance, la critique est sur la gouvernance qui est un point très important. On voit d’ailleurs dans les exemples cités que le modèle classique de chefs qui décident et d’usager.es qui éxécutent est pas fondamentalement remis en question. Ça peut tout à fait être un choix, de ne pas vouloir prendre du temps pour gérer le collectif, mais ça laisse la possibilité de dérives telles que celles que l’on veut justement fuir.
La critique doit être vue comme positive et émulatrice.
Je pense que ça vaut le coup de le rappeler: on est en train, en ce moment, les générations actives en ce moment, d’inventer un modèle post-capitaliste. Les coopératives, SCOP, SCIC sont un outil, les organes totalement autogérés en sont un autre. Vous y trouverez pas les mêmes personnes ni les mêmes fonctionnements, vous n’y trouverez pas les mêmes possibilités, le même investissement demandé. Ce que vous y trouverez par contre, c’est une volonté de casser la logique de profit et d’exploitation.
Oui l’autogestion c’est un investissement. J’ai bossé 3ans dedans et c’était pas ussi organique que ce témoimgnge car on vivait un rythme de croisière et on faisait l’acceuil du publique pour l’esseimage.
Et malgré l’autogestion, yavait pas mal de tension. En fait, personne n’est vraiment au meme niveau dans le temps et chacun, chacune avait son expertise. Donc, c’est plutot tous des chefs. Et t’as les nouveau, les anciens, le tuillage…sans cesse.
Et encore c’était pas droit dans leur botte vis à vis du code du travail.
Il y a un excellent texte qui date des années 70 qui explique que les structures de pouvoir ont une tendance à émerger même dans les groupes “sans hiérarchie” et invitait plus à expliciter une structure équilibrée et penser des contre-pouvoirs plutôt que de laisser l’ancienneté, l’accès, la disponibilité, la gouaille donner la parole et le pouvoir à toujours les mêmes.
C’est une expérience qu’on fait tous ceux qui ont pratiqué l’autogestion: faites un groupe de discussion sans règles et sans coercition, et vous aurez une ou deux personnes qui accapareront toute la discussion. “Forcez” des interruptions et “forcez” à parler chaque personne présente, et vous aurez souvent des points de vue plus variés et des timides que d’habitude on n’entend pas donner des points de vue plus intéressants que les grandes gueules. Vous entendrez aussi plus de paroles féminines.
Perso je suis un fan d’auto-gestion. Je déteste les hiérarchies et je pense qu’il faut qu’on arrive à faire marcher ça. Mais “on y va YOLO sans règles en étant tous gentils” je n’y crois plus. Ça marche à 5 ou 6, mais ça explose au premier connard. L’auto-gestion c’est difficile, mais il est possible de se mettre d’accord unanimement sur des règles et des pratiques.
Et parfois, avoir un gestionnaire, qui n’a pas à être un chef, est une bonne chose. Je veux bien participer à l’assoce qui met en place le circuit d’eau local, je veux bien aller y bosser quelques heures par mois et qu’on me dise quoi faire, mais je serais reconnaissant que quelqu’un d’autre prenne la charge mentale de se poser la question de ce qui est à faire. J’ai d’autres sujets de réflexion, je veux bien laisser celui là à d’autres. Par contre si c’est un con ou une conne, je veux qu’on ait un moyen facile de changer.
Oui et je l’ai conssaté, c’est là que j’ai compris que l’autogestion n’etait pas immuable mais perpetuelle. Le schema de l’horizontalité est mauvais car il ne prend pas en compte les dynamiques humaines, ni le temps. On m’avait expliqué : pyramide bad, horizontal bien. Mais pas le temps et l’évolution.
Toi comme toi, sans cadre, c’est le meilleur moyen d’eclater l’osmose collective. Le cadre nous a bien aidé. Et j’ai vu de bons exemple nottament au maquis.
Après, comme tu dis, on appliquait ces contre-pouvoir que lepage aborde très bien dans son tableau des cheffes. Des rotation, maitre de temps, penser-écoute mais ça restait très hierarchisé parce que l’investissement était telle que les anciens portaient la structure. La structure avait hérité d’un fonctionnement productiviste.
Et donc ça pouvait aller au burn-out assez rapidement. Meme si les nouveaux donnaient tout et essayaient de prendre le relais. On la gerait à 8, avec 1/2 journée de réunion tous les mardi soir.
Moi, au bout d’un moment j’en pouvais plus de ces réunions. Autant je comprenais l’interet mais ça prenait le pas sur le jardin, qui, pour moi n’était pas compatible avec ce planning collectif en fait. Ya des semis, de la tonte, le marché…c’est 1 planning très différent.
J’ai eu le témoignages de fermière qui nous ont expliqué pourquoi elles faisaient collectif à part. Le rythme etait très différent.
Je gerais le jardin. Au final, l’autogestion, j’ai pas aimé car j’avais pas vraiment de place pour prendre des initiatives et c’était pire pcq je connaissais rien au jardin. Au final c’est dans ces moments là que je me disais qu’on pouvait fonctionner séparément tout en gardant l’aspect collectif.
Je trouvais la posture chef de jardin bien mieux en terme d’organisation et d’efficacité. Là avec le collectif, on etait perdu dans l’hebergement, restauration et en plus de mon temps de jardinage, fallait que j’en donne à l’évènementiel, cuisine…tu te repose pas. Yavait une notion de tranversalité organisationel qui ne passait pas.
C’est une trop grosse structure. Trop imbriquées, un énorme poulpe sur une flaque d’eau. Et finalement, c’est quand je suis parti, quand le collectif s’est effondré que le jardin allait mieux car géré indépendament du collectif comme jardin partagé et maraichage. Et le collectif a emergé sous une autre forme plus souple je crois.
Perso, la structure autogérée que j’ai trouvé tellement bien fonctionner que je ne m’étais pas rendu compte que c’était un mode de gestion à part c’est l’open source. Et son pendant: la do-ocracy. Tu donnes le pouvoir à ceux qui font. T’as envie de gérer le jardin? Tu gères le jardin si personne d’autre n’a envie de le faire. Quelqu’un pense que le jardin devrait être fait autrement mais a pas le temps de le faire? Son opinion est purement informative.
On prend des décisions collectives que sur les décisions irréversibles et graves.
T’as fait un truc bien? On t’applaudit. T’as fait une connerie? On l’assume collectivement.
Et on accepte qu’on a des compromis avec l’idéologie. On fait ce qu’on peut. On essaye de faire “mieux” à défaut de “parfait”. Y a un proprio, ben il a en effet un mot à dire. On a accepté des subventions? Bon ben y a un rapport à écrire. Y a Bob qui a payé la tondeuse à gazon et il croit plus au projet? Bon ben il a le droit de repartir avec si il insiste.
On jongle, on fait ce qu’on peut, et on a l’impression de tâtonner, mais quand on se retourne, on réalise qu’on est allés beaucoup plus loin et beaucoup plus facilement que ceux qui galèrent dans l’économie classique.
On prend des décisions collectives que sur les décisions irréversibles et graves.
Ba voilà ce que j’aurais aimé avoir. 🥺
Et on accepte qu’on a des compromis avec l’idéologie. On fait ce qu’on peut. On essaye de faire “mieux” à défaut de “parfait”.
Là ce qui était difficile avec ma stucture, c’est qu’iels avaient un niveau d’exigence. Donc ça mettait une pression de résultat parce qu’on etait toujours à la recherche de fond : la dette.
Y a Bob qui a payé la tondeuse à gazon et il croit plus au projet? Bon ben il a le droit de repartir avec si il insiste.
Trop bien ☺️
Ben de mon coté, c’est quelque chose que j’aurais aimé voir dans ce collectif autogéré. 😔 J’ai payé la plupart du matos, graines, terreau de ma poche et aussi la bouffe, plus le loyer alors que j’étais bénévole à temps plein. C’est l’origine de mon départ.
En plus que j’essayais de faire avancer les choses : réparation pompe, serre…j’ai arroser les serres avec des arrosoirs, à la main. La commande de terreau étaient bloqué pq x me demandait de voir y et y de voir avec x. C’est ce genre de détail qui font que j’ai préfèré le faire moi-meme, j’ai arreté d’attendre la réponse du collectif, j’ai pris un bénévole et on est allé cherché tout ça. Beaucoup plus efficace, moins de stress.
C’est une stucture alternative, humaine, dynamique mais…voilà, c’est pas mes valeurs. J’ai appris bien plus tard que c’est ce qu’on appelle travail noir. Moi sur le coup, ça me derangeait pas parce que je decouvrais l’agroécologie, me formait en autodidacte, découvrait krisis, anarchisme, la politique, l’éducation populaire…tout ça.
Et c’était superbe. J’espère pouvoir reprendre une partie quand je momterais ma stucture mais ce sera difficile. J’ihnore vraiment si j’aurais le mental pour porter tout ça. On verra.
Pour partir, c’était compliqué car il fallait une transistion, un relais. Je pouvais pas partir comme ça. J’ai attendu un peu qu’il y ait un relais.
Faut pas rester sur une défaite :-) Monter de l’autogestion avec des vétérans qui ont des expériences similaires change tout.
@keepthepace @Snoopy@jlai.lu iels ont de l’expérience, cette structure a plus de 10 ans et est assez connue en fait. :)